En 2018, j'ai été sélectionné pour réaliser une résidence artistique d'une semaine près de Barcelone. A cette époque ma fille avait vingt mois et jusqu'à ce moment je ne m'étais jamais séparée d'elle ni arrêté de l'allaiter. J'étais excitée à l'idée de démarrer un projet artistique mais en même temps terrifiée à l'idée de m'éloigner de ma fille. La résidence a été marquée par la douleur de la rupture physico-affective et par une obsession : tirer du lait de mes seins pour continuer d'allaiter à mon retour. Pour cela, j'ai dû apprendre à utiliser le tire-lait. Etre méthodique avec le fonctionnement de l'appareil, régler les horaires et ne pas me stresser, car le stress ou l'anxiété peuvent ralentir l'écoulement du lait. Je me tirais du lait trois fois par jour. Matin, midi et soir. Et je faisais de ce moment un rituel sacré et spécial. Je sentais qu'à travers mes seins je continuais à nourrir ma fille, et je continuais à me nourrir d'elle. Mes seins transportaient tout l'amour. Maman est toujours là. Maman sera toujours là. [source artiste]